Pour couvrir et partager les sujets qui me passionnent ainsi que mon mandat d’élu, j’ai créé un blog : http://ugobessiere.fr/
Je suis né en 1988, année de parution du premier rapport du GIEC, mais ma première expérience « militante », celle qui me transformera pour le restant de la vie, a eu lieu au lycée, suite à la lecture du rapport du Club de Rome dit « Meadows ». C’est le jour où j’ai compris que le type de société dans lequel nous évoluons non seulement n’était pas compatible à long terme avec les limites physiques de la planète, mais qu’il était surtout en train de détruire de manière irréversible les conditions nécessaires à la vie sur Terre. Déflagration. Ce n’est pas possible, les autres doivent être au courant ? Et bien non, je découvre que les autres ne se posent pas forcément autant de questions. « La personne lucide souffre deux fois, dit Stephan Zweig, avant la catastrophe et après la catastrophe ».
Il est vrai que ma famille n’est pas étrangère à l’engagement et au besoin d’espérance, non pas pour que le monde soit parfait, mais pour s’opposer aux bâtisseurs de ruines (Éluard), pour éviter qu’il se défasse (Camus). A 16 ans, ma Grand-Mère paternel brûla des documents destinés à envoyer des jeunes au STO et servit d’intermédiaire aux réseaux de résistances lyonnais ; plus tard, elle participa avec son mari à une communauté de fabrication de montres qui visait à redéfinir l’organisation du travail autour des principes d’autogestion et d’équité. A 17 ans, mon Grand-Père maternel fut brancardier lors des bombardements de Caen (2 000 civils tués), marqué à vie il passera l’entièreté de sa carrière d’universitaire à agir pour le rapprochement des peuples et la construction de la paix en l’Europe.
Lors de mes études à Sciences Po Grenoble et au Collège Européen de Bruges, je m’aperçois que l’économie néoclassique nous rabâche les oreilles avec le capital et avec le travail, mais que rien ou presque n’est dit sur les facteurs « ressources naturelles » et « écosystèmes », dont dépendent pourtant notre survie et toute l’organisation du modèle actuel. Quelle découverte terrifiante que de se rendre compte que les formations censées éclairer les futurs décisionnaires du pays font l’impasse sur l’essentiel ! Et c’est d’ailleurs la même chose pour les ingénieurs. Electron libre, curieux de tout, j’ai par ailleurs horreur des silos et des champs académiques, et mon gout pour la transversalité me rapproche du courant écologiste qui place les « interdépendances » au cœur de sa pensée. Avec un camarade ingénieur, j’écris un article sur les limites du modèle pétrolier et je cherche d’autres formes d’économies soutenables qui puissent apporter d’autres horizons au couple mortifère capitalisme/productivisme (mémoire sur l’économie sociale et solidaire qui valorise les « liens » plus que les « biens »).
Très vite je lis les classiques Georgescu-Roegen, Gorz, Reclus, Illich, Naess, Bateson, Morin, Descola, Méda, puis les jeunots Parrique, Servigne, Keller… Je comprends que notre modèle productiviste est le fruit d’un enchaînement subtil de bifurcations épistémologiques qui prend ses racines au-delà du seul capitalisme industriel, et qui pose la question de la définition de l’humain dans sa quête de sens et son rapport au monde (ontologie, mythes). Je suis en désaccord avec le radicalisme des postulats matérialistes et utilitaristes qui régissent encore nos perceptions du monde et de la science (en particulier l’héritage cartésianiste qui sépare nature et culture, mais aussi corps et psychisme). Je reste un fin partisan du progrès et des Lumières mais pas au prix du déni techniciste actuel qui cherche à tout prix à maintenir l’illusion d’un humain surpuissant au centre du monde, ni des objectifs suicidaires de croissance dont la confusion avec le bien-être persiste encore aujourd’hui. Je décide de quitter la bulle européenne, trop abstraite pour moi et dans laquelle je ne me sens pas à ma place.
À la recherche de solutions concrètes et de positif, je débarque dans l’estuaire de la Loire à Nantes, terre de mouvements dont l’horizon dégagé et la présence de l’eau apaise mon monde intérieur. Je me jette corps et âme dans le militantisme, qui à l’époque est la meilleure façon pour moi de sortir de la sidération de ces découvertes d’un monde poussé inexorablement vers sa perte. Je travaille à la Région des Pays de la Loire pour le groupe écologiste. En 2013, je co-construis puis co-anime le collectif Alternatiba Nantes, que nous déclinons depuis le pays basque dont il est originaire (John Palais, Txetx Etcheverry). Village convivial qui dévoile dans la rue au grand public des solutions et un récit qui mobilise sur le modèle des villes en transition de Rob Hopkins, et dont l’aboutissement sera la grande mobilisation climat lors de la COP21. J’en ai expliqué la méthode dans un article du Green European Journal. Usé par un quotidien de militant, miné par l’immobilisme des gouvernements successifs, j’ai besoin de changer d’air.
Vieux fantasme d’adolescent, je reprends des études d’éducateur sportif qui m’amènent pendant 2 ans à fréquenter le service des sports du Département de Loire-Atlantique, unique en son genre. J’ai la chance d’évoluer dans un environnement assez libre, qui me fait confiance, et avec mon chef de service nous développons des dispositifs sportifs (pratique sportive mais aussi éducatives et sociales) à destination des publics les plus fragilisés ou éloignés, notamment les mineurs exilés. J’y retrouve là aussi l’importance des liens pour vivre, me retrouvant à nouveau en prise avec une certaine forme d’impuissance à transformer les choses. Je découvre sur le terrain le monde du médico-social et de la protection de l’enfance, ses laissés pour compte, ses colères, ses manques de moyens, mais aussi sa grande générosité. J’ai relaté cette expérience dans un rapport pour mon diplôme d’éducateur sportif.
Je m’installe sur l’ile de Nantes, à la croisée des trois fleuves, l’Erdre, la Sèvre et la Loire. Même si parfois le Vercors et les senteurs de ma Drôme natale me manquent, j’aime la géographie de la Loire-Atlantique, composée de territoires d’eau – que ce soit le littoral, la Loire, ou les marais – qui alternent avec le bocage et de rares forêt comme celle du Gâvre. Ces espaces naturels protégés par le Département et magnifiquement saisit par le photographe Etienne Bégouen laisse aller à la rêverie et permettent de se connecter pleinement au vivant sensible. Majoritairement urbain, je passe beaucoup de temps à explorer et ressentir le rural. J’aime me balader le long de sentiers aménagés par le Département (PDIPR) ou en mer et en rivière, car quoi de mieux pour comprendre et défendre un territoire que d’aller à sa rencontre en marchant ou en naviguant, en prenant le temps du « vécu » ?
Ce sont des rencontres déterminantes et un parcours personnel réflexif et introspectif qui me pousseront plus tard vers le métier de psychothérapeute. Je reprends des études pour 5 années au CIFPR : à l’instar de l’écologie, cette école fait du relationnel et du multi-référentiel deux conditions fondamentales pour accompagner les hommes et les femmes dans leur prise d’autonomie. J’espère d’ici quelques années pouvoir ouvrir mon propre cabinet à Nantes notamment pour accompagner celles et ceux qui souffrent d’éco-anxiété et de traumatismes. La conscience d’une certaine forme d’irréversibilité que pose la contrainte écologique réveille les angoisses existentielles et les grandes questions que tout humain traversent au cours d’une vie. Comme avec toute crainte, il est important d’en formuler un sens.
En 2021, encouragé par des pairs, je passe le cap de l’engagement politique dont je craignais l’exposition médiatique, en me présentant en tant qu’écologiste aux élections départementales. quelques jours plus tard me voilà élu conseiller de Nantes 3 en charge du Projet Alimentaire du Département (que je qualifierai de « reterritorialisation d’un système alimentaire durable »), mission confiée par le nouveau président de gauche Michel Ménard.
Pour couvrir et partager les sujets qui me passionnent ainsi que mon mandat d’élu, j’ai créé un blog : http://ugobessiere.fr/